L’horloge de la cuisine (1946)

Traduit et adapté de la nouvelle de Wolfgang BORCHERT

par Marco POLLI

durée: 7:49 minutes

1946, en Allemagne dévastée, n’importe sur un banc. « Ils le virent arriver de loin, car il ne passait pas inaperçu. Il avait un visage de vieux, mais à sa démarche on voyait qu’il n’avait que 20 ans. Il s’assit avec son vieux visage à côté d’eux, sur le banc. Et il leur montra ce qu’il tenait à la main à ceux qui étaient assis sur le banc au soleil, les regardant l’un après l’autre… C’était l’horloge de notre cuisine. » Le jeune homme de L’horloge de la cuisine (« Die Küchenuhr ») s’accroche à sa montre, tout ce qui lui reste. « Mais elle ne marche plus ! », dit une femme. Oui, mais elle s’est justement arrêtée à deux heures et demie. Comme lui qui ressasse ce moment sa mère lui préparait à manger. La nuit, je veux dire…

à Hambourg en 1921, Wolfgang Borchert a 26 ans lorsqu’il s’éteint dans une clinique bâloise des suites des privations endurées durant ses longs mois de cachot militaire. Pourtant, enfant, il avait des rêves, devenir artiste de cabaret. Il a 15 ans lorsqu’Hitler est élu chancelier, en 1936. Quatre ans plus tard, il est mobilisé. Pas question d’y échapper. Il garde un esprit frondeur, qui lui vaut une première incarcération pour « défaitisme ». Envoyé sur le front de l’Est, accusé de s’être mutilé la main droite pour ne plus pouvoir tirer, il est condamné à mort pour trahison. Peine commuée en cachot. La fin de la guerre le libère malade, constamment fiévreux. C’est dans cette fièvre qu’il écrira ses nouvelles, des manifestes, et sa pièce radiophonique « Devant la porte », narrant les tribulations du soldat Beckmann, un égaré qui revient du front de l’Est après 1000 jours, dans une Allemagne dévastée, tentant d’oublier l’humiliation de la défaite - avec ses questions que personne ne veut entendre. Il faut tourner la page, reconstruire, alors on dénazifie des lampistes.

 

btn_download